Combat aérien : Manœuvres essentielles


Manœuvres essentielles

Cette première section décrit des manœuvres que je qualifierais d'essentielles, pour la survie en combat tournoyant ou à l'énergie. Une première partie décrit surtout des trajectoires, et introduit des concepts vitaux pour comprendre la suite de cette théorie : Lead, Pure et Lag Pursuit. La suite passera en revue les ciseaux à plat, les yo-yo haut et bas, ainsi que la spirale défensive.

Trajectoires

Il existe trois sortes de façons de suivre un autre avion (pursuit) : lead pursuit, pure pursuit, lag pursuit.

Ciseaux à plat

Les ciseaux sont considérés ici comme une manœuvre défensive. Il n'existe pas de ciseaux offensifs, les ciseaux sont une réponse à une erreur d'un bandit en position offensive. On ne doit pas engager des ciseaux n'importe comment, il faut choisir l'instant et la situation propice, et si besoin créer cette situation.

De manière générale, on parle de ciseaux lorsque deux avions tentent de se placer l'un derrière l'autre, dans une série de virages nez à nez. Les ciseaux peuvent être à plat ou barriqués, les premiers étant de loin les plus utilisés. Le vainqueur dans un engagement en ciseaux à plat est celui qui arrive à réduire sa vitesse le plus rapidement possible. En effet, en virage nez à nez, c'est le rayon de virage qui détermine principalement les performances en virage, le plus faible gagne ; et le taux de virage est très dépendant de la vitesse (il diminue avec elle). De plus, le bandit allant plus vite, il a naturellement tendance à passer devant. Nous allons ici nous concentrer sur les ciseaux à plat, laissant les ciseaux barriqués pour plus tard.

Les ciseaux à plat sont une succession de cycles de trois étapes : virage nez à nez, renversement, lead turn. La première phase est remportée par le plus lent au départ, il faut donc ralentir au maximum durant cette première phase. Une fois que l'un des deux a gagné un peu de terrain, il doit faire un lead-turn pour asseoir son avantage. Le renversement est un moment critique, plus il dure plus on laisse l'autre reprendre l'avantage. Les gros taux de roulis (Fw-190) peuvent ainsi compenser une vitesse trop importante au départ.

Les ciseaux sont à engager lorsque l'ennemi a overshooté, c'est à dire qu'il a croisé notre trajectoire derrière nous : il est par exemple passé de nos 5 heures à nos 7 heures. On peut provoquer un overshoot en tournant très serré vers un bandit qui se trouve assez loin dans nos six heures : il y a alors des chances qu'il ne puisse pas se maintenir dans notre virage, et qu'il overshoote. On caractérise l'overshoot de trois façons :

Supposons qu'un bandit overshoote notre trajectoire. On regarde alors ce qu'il fait, car il est probable qu'il tente de minimiser l'overshoot en entamant un Yo-yo haut (voir plus bas pour la description de cette figure) ; on peut s'en apercevoir s'il met les ailes à plat, ou réduit juste son inclinaison, et n'a plus son lift vector dans notre plan de virage.

Dans ce cas, on a basiquement trois choix :

Supposons maintenant qu'il n'a pas fait de Yoyo : on décide alors de renverser pour engager le combat. Le but du renversement est d'arriver à se placer derrière la bandit, c'est à dire de la placer en avant d'une ligne formée par nos ailes (allant de nos 3 heures à nos 9 heures). Il ne faut pas renverser dans toutes les situations, et penser aux performances de virage des deux avions. Inverser dans un avion à haute charge ailaire, donc assez peu performant en virage, contre un avion à faible charge ailaire peut signifier qu'on va gentiment venir se placer devant ses canons, ce qui n'est pas exactement le but de la manœuvre (CTRL + E, tout ça...). Dit plus simplement, les ciseaux sont à éviter quand on est dans un avion rapide et peu maniable (et lourd aux ailerons).

On peut renverser son virage de deux façons. Soit on desserre totalement le virage, puis on met du roulis, puis on repart en virage dans l'autre sens, soit on inverse tout en gardant un facteur de charge important. On peut éventuellement utiliser du palonnier pour augmenter le taux de roulis, mais attention : mettre du palonnier pour aider un renversement, alors qu'on applique un facteur de charge non négligeable est la meilleure façon de déclencher et de finir en vrille. A manipuler aussi précautionneusement qu'un robot mixeur rempli de nitroglycérine dans un magasin de porcelaine, donc. La première technique (renversement sous 1G) est à utiliser lorsque le bandit a overshooté à grande vitesse, ou avec un angle important : il a lui-même créé l'espace nécessaire pour renverser correctement ; si il est à faible vitesse (par rapport à nous) et / ou faible angle de croisement, mieux vaut utiliser la seconde (renversement à G > 1), qui va minimiser le rayon de virage. On va ainsi pouvoir faire quelque chose avec le peu d'espace que nous laisse le bandit.

On reste ici très vague en parlant d'angle "important", de vitesse "grande", c'est volontaire, car tout dépend du contexte. La vitesse du bandit en elle-même importe peu, c'est sa différence de vitesse avec la nôtre qui importe. Et encore, cette différence de vitesse ne veut pas dire grand chose si on ne connaît pas les capacités d'accélération des deux avions, par exemple. Pareil pour l'angle, on ne peut le prendre en compte en laissant de côté les performances de virage des deux avions ; de plus, l'angle et la vitesse sont tous les deux importants, ne tenir compte que de l'un peut conduire au désastre. Bref, tout ceci est à expérimenter soi-même, et par exemple des ciseaux en Fw-190 sont totalement différents des ciseaux en Bf-109...

Il faut orienter correctement son avion après le renversement. On ne cherche pas ici à se placer en position de lead, voire pure pursuit : on veut juste se caser dans ses six heures. Si on peut viser ses six heures hautes, c'est encore mieux. D'autre part, on cherche un faible rayon de virage, donc on va réduire sa vitesse à la corner speed ou en dessous de la corner speed. Donc si on est au-dessus de cette corner speed, on réduit la vitesse le plus rapidement possible (gaz à 0%, volets sortis s'il le faut). Il faut par contre éviter de trop la laisser descendre, pour ne pas perdre toute l'énergie dont on dispose.

La phase du renversement est essentielle : ayant l'avantage, plus on anticipe la trajectoire de l'autre, plus on prend le risque d'essuyer une rafale en passant devant l'autre ; mais du même coup on gagne un bon avantage en sortie de manœuvre (petite séparation, faible AOT). Plus on est lent, moins on court de risques dans cete situation : l'autre a bien une opportunité de snapshot mais il passe devant très rapidement.
Si on renverse en passant juste sous le bandit, on diminue le risque mais on sort avec une séparation et un AOT plus important.
Si on attend d'avoir le bandit dans le collimateur avant de renverser, la séparation et l'AOT en sortie sont encore augmentés. Généralement, un TCA et une vitesse de croisement importants sont nécessaires pour pouvoir anticiper un renversement sans prendre trop de risques.

Nous sommes maintenant engagés dans les ciseaux, on est en train de tourner serré vers les six du bandit, qui fait de même. On a alors deux objectifs : rester derrière sa ligne 3 heures / 9 heures, et aligner notre fuselage avec le sien pour pouvoir shooter en déflexion. Le premier objectif est seulement une question de vitesse, dans la direction générale du combat. Cette vitesse n'est pas tout bêtement la vitesse de l'avion. Cette dernière serait égale à la distance totale parcourue, divisée par le temps nécessaire à ce parcours ; alors que la vitesse qui nous intéresse est égale à la distance parcourue dans la direction générale du combat divisée par ce même temps. Comme l'avion peut très bien parcourir 1 km, et n'avancer que de 500 m dans une direction donnée (en faisant des virages), ces vitesses n'ont pas beaucoup de rapport. Néanmoins, si on parcours le même chemin (même trajectoire), adopter une vitesse plus faible va réduire la vitesse dans la direction du combat. Réduire sa vitesse est donc quand même utile.

Pour réduire notre vitesse dans la direction du combat, on doit tout d'abord utiliser le trim : ce dernier va aider à rester en permanence dans le virage, et empêcher une réduction trop importante du facteur de charge, qui augmenterait notre vitesse. De plus, cela va aider à tourner plus efficacement. Il faut aussi agir sur les gaz, de façon à garder une vitesse légèrement inférieure à la corner speed (en général, la vitesse minimisant le rayon de virage est inférieure à la corner speed). On peut appliquer une règle assez simple : mettre les gaz quand on applique des G, les réduire le reste du temps. Cela permet de ne pas accélérer pendant les phases où le facteur de charge est réduit (typiquement, un renversement). Si vous faites vos renversements sans réduire le facteur de charge, vous aurez probablement besoin de garder les gaz à fond si vous voulez garder un peu de vitesse. Ne pas perdre de vue que le but est de garder une vitesse à peu près idéale, pas de se retrouver à 150 km/h en deux virages ! Sinon, dans le cas où le bandit monte le nez, vous passerez en quelques secondes d'une mauvaise situation à une situation désespérée...

Les chasseurs ayant un bien meilleur taux de montée que leur adversaire peuvent envisager de monter de plus en plus tout en ciseautant, pour laisser l'autre en dessous et prendre l'avantage en replongeant sur lui (monter réduit aussi la vitesse dans la direction du combat).

Un bon usage des volets est aussi conseillé. En effet, les volets permettent d'appliquer un facteur de charge supérieur à une configuration lisse pour une vitesse égale, ainsi que de limiter le risque de décrochage. Le taux de roulis est très important dans des ciseaux, on peut l'améliorer en utilisant le palonnier, mais c'est dangereux et risque de faire décrocher. Mettre des volets est donc une bonne chose, par contre évitez de mettre trois crans de volets en permanence, c'est inutile, et ça vous ralentit beaucoup ; vous n'allez pas être capables de rester à la vitesse idéale. Un à deux crans sont normalement suffisants, ceci dépendant bien sûr de l'avion...

La possibilité de faire des virages anticipés (c'est à dire, ici, avant de croiser le bandit) a été évoquée plus haut ; cela peut donner un gros avantage, comme faire perdre le combat à cause d'une mauvaise appréciation. Disons que cette manœuvre est à utiliser quand on a déjà un avantage sur le bandit.

A chaque croisement, il est possible que l'un des deux ait une possibilité de tir. Si c'est votre cas, prenez-la si l'ennemi est dans le même plan que vous, mais dans le cas contraire n'essayez pas à tout prix de mettre le nez sur lui, prenez votre virage au mieux et attendez une meilleure occasion. Si le bandit semble avoir l'avantage sur vous, changez légèrement de plan au croisement, cela vous fait perdre encore un peu de terrain (et encore), mais si il vous touche le combat risque de se terminer rapidement !

Dans le cas où les ciseaux tournent mal, et si vous ne les avez pas commencés sous la cime des arbres, il est possible de désengager, juste après un croisement, en continuant dans le même virage (sans renverser, donc), jusqu'à reprendre visuel sur le bandit qu'on avait fait passer dans les six. Cette manœuvre ne suffira peut-être pas à vous tirer du combat, mais fournit de la séparation, et permet de réengager en de meilleurs (moins mauvais ?) termes.

Yo-yo haut

Le yoyo haut permet aussi d’éviter d’overshooter, et de réduire l’AOT ; il peut se faire quand on a à peu près la même vitesse que l'autre, et qu'on manque de lead pour un lag roll. Dans l’exemple ci-dessous, on est dans le même virage que l'autre, l'AOT augmente, on se rapproche assez rapidement et on va overshooter si on continue le même virage. On met alors les ailes à 45° (en roulis) et on monte (1). Une fois au-dessus (2), on vise sur/devant/derrière l'autre (suivant le rapprochement qu'on veut avoir à la fin) et on tire le manche pour se retrouver en position (3). Ici, le pilote a décidé de prendre du lead pour faire une passe de tir en déflexion sur le bandit.

Exemple en image

Il ne faut pas monter avec trop d’angle, car on diminuerait trop la composante horizontale de la vitesse et on laisserait un espace à l’autre pour augmenter la séparation et s’échapper. On ne doit pas non plus piquer trop fort sur le bandit, lui laissant la possibilité de partir en chandelle et générer ainsi un overshoot vertical.

Yo-yo bas

Il est destiné, contrairement à pas mal de figures hors du plan vues jusque là, à diminuer la séparation et à gagner de l'angle, mais il augmente l’AOT (c’est une manière efficace de couper un virage). Dans l’exemple, on se trouve dans le même virage que le bandit, mais assez loin et on n'a pas la possibilité de prendre de lead pour shooter : on est au maximum des possibilités de virage de l’avion. On baisse alors le nez, et la pesanteur aide alors le virage, permettant idéalement de gagner du lead (1) ; on commence ensuite à remonter tout en réduisant le taux de virage, quasi en cap d'interception si c’est possible, c'est-à-dire sans changer de cap (2); on se retrouve alors en-dessous du bandit avec un angle médiocre (AOT important), mais on a quand même une belle occasion de tir et on peut éventuellement serrer encore le virage, si possible, pour se placer derrière le bandit (3).

Exemple en image

Plus on prend de lead après (2), plus on se rapproche de l'autre; mais plus l'angle à rattraper en (3) est important. Mieux vaut deux petits yoyos qu'un trop gros; on s'expose moins à des contre-manœuvres (le défenseur peut virer après (2), en s'aidant de la gravité, pour rencontrer l'autre en quasi frontale; il peut aussi grimper (barrel-roll attack) pour se retrouver avec plus d'énergie derrière. Voici le schéma rituel :

Spirale défensive

En gros, des rolling scissors très serrés, direction verticale descendante. Avec un bandit dans les six, on peut générer de l'AOT en passant quasi sur le dos et en tirant sur le manche, on enclenche alors une spirale descendante. Si l'autre suit, les deux avions vont tourner l'un autour de l'autre, comme pour des rolling scissors. On ne peut continuer ça indéfiniment, à cause du sol, donc il faut bien tenter de faire passer le bandit devant (dessous). On ralentit l'avion avec volets, trains, gaz à zéro, etc pour rester le plus lent possible. Une fois que l'autre est passé, on fait ce qu'il faut pour rester à la bonne distance au-dessus de lui pour l'avoiner quand il va redresser ; on peut aussi s'évader facilement. Si on choisit la première solution, il ne faut pas rater son coup car l'autre va sortir de la figure avec plus d'énergie. A un angle de descente supérieur à 40° c'est la vitesse qui est prédominante pour calculer la vitesse de descente ; en dessous de 30° c'est l'angle de descente qui est prédominant. Il faut rester en dessous de la corner speed.

Exemple en image

Pour que cette technique marche, il faut entraîner l'attaquant dans la spirale : quand le bandit est en position de tir ou presque, on débute doucement la figure (on met peu de roulis, juste assez pour être en avance sur l'autre). Alors que le bandit tente de suivre, il se retrouve dans la spirale et on a déjà commencé à casser la vitesse. Si un bandit tente de se défendre en engageant une spirale défensive, la meilleure manière est de continuer le virage à plat, à sa verticale, et de descendre ensuite, avec une bonne marge.

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